Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/88

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tulipes… Les grands toits rouges, aux pentes inégales, semblent adossés à l’église Saint-Martin, et c’est d’eux que le beau clocher paraît sortir, gris comme un ramier, moiré de mauve par le crépuscule, enjolivé de boules, de pointes ouvragées, de girouettes d’or sur ses clochetons bulbeux.

Avec trois couleurs, on pourrait peindre ce lieu, humble et puéril ainsi qu’un pensionnat pour de vieilles enfants très sages. Un peu de rouge, un peu de vert, un peu de gris pour les fonds, les blancs mêmes du papier. On n’aurait pas besoin de placer, devant la chapelle, à gauche, sous le porche de brique, une béguine noire et blanche comme une hirondelle fatiguée. L’âme du Béguinage s’exprimerait par la simplicité de la composition, par la crudité enfantine des couleurs, par la tranquille tristesse du ciel sur le clocher d’ardoise…

Claude et Marie ne s’attardent pas à regarder derrière la vitre, sous le porche aux colonnes torsadées, le Christ espagnol vêtu de pourpre et qui saigne horriblement, entre deux anges suaves, bleu tendre et rose tendre, dont l’un tient un grand mouchoir. Les jeunes gens vont, par les ruelles tournantes, où l’herbe croit entre les maisonnettes blanches, vertes et rouges. Des noms latins sont inscrits sur les portes. Dans un