L’âme de mademoiselle Loiselier, une jeune fille pure, simple, obéissante à ses parents, chrétienne par l’éducation, sinon par le cœur, cette âme vous paraît donc moins précieuse que l’âme de madame Manolé, une étrangère aussi, différente de vous, hostile à ce que vous aimez, et païenne ?…
— Mademoiselle Loiselier a des parents, ses protecteurs naturels… L’autre est seule, toute seule…
— Vous avez vu les parents de mademoiselle Loiselier. Quelle espèce de protection, de direction morale, peut-elle attendre de ce père abruti, de cette mère coquette et vaine ?… Évidemment, madame Manolé vous serait odieuse si vous la considériez de sang-froid. Elle est l’ennemie de votre Dieu…
— Non pas l’ennemie… Rappelez-vous ses paroles !
— Jésus a dit : « Qui n’est pas avec moi est contre moi. »
— Je veux la persuader, la conquérir…
— Pour diminuer la distance qui vous sépare d’elle… Vous n’avez jamais pensé à conquérir mademoiselle Loiselier.
— Ah ! comme vous me harcelez ! s’écria le jeune homme douloureusement. Moi, j’aime Fanny Manolé !… Je viens de rester près d’elle, seul à seule, et savez-vous de quoi nous avons parlé ?… De Port-Royal… Ce n’est pas un sujet de conversation qui prête à la galanterie…
— Il n’est pas question de galanterie ! dit l’abbé en haussant les épaules. À la femme que vous aimez le mieux, vous parlez de ce qui vous intéresse le plus… Voyons, mon enfant… (Et l’abbé posa sa main rude sur l’épaule d’Augustin.) Comprenez-moi. Je vous