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Page:Tinayre - La Maison du péché, 1902.djvu/203

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nous serait commun ; mais, ainsi… je ne veux pas, je ne peux pas… Je dois me suffire à moi-même, et je me trouverai très heureuse et très riche si vous m’aimez…

Jamais le boulevard, la maison, le vestibule, n’avaient semblé plus navrants à M. de Chanteprie, que par ce triste soir de Noël. Chez Fanny, dans le couloir en boyau qui servait d’antichambre, il aperçut des chapeaux, des vêtements accrochés, qui révélaient la présence de plusieurs convives. Il en fut contrarié.

— Nous ne serons pas seuls ?… Si j’avais su !…

— Vous ne seriez pas venu… C’est bien aimable, ce que vous dites là !… Entrez un peu dans ma chambre, que je vous gronde.

Fanny le poussait dans une petite pièce où brûlait une veilleuse, et, la porte fermée derrière eux :

— Méchant ! méchant !… Comme vous arrivez tard ! Vous mériteriez !… Mais vous êtes là… Je vous pardonne… Embrassez-moi donc, sauvage !

Qu’elle était jolie dans sa robe à paillettes noires qui l’enveloppait toute de bruissements et de reflets ! Mais Augustin ne remarqua pas la robe choisie pour lui plaire. Il dit, entre deux baisers :

— M. Rennemoulin est ici ?

— Oui. Vous le saviez donc ?

— J’ai cru faire un mensonge, tout à l’heure, en disant à ma mère que je devais voir M. Rennemoulin…

— Voilà votre conscience en repos…

— L’intention coupable demeure, ma pauvre Fanny… Que c’est horrible de mentir tout le temps, à tout le monde !