Page:Tinayre - La Maison du péché, 1902.djvu/72

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du jeune homme, ébaucha un geste vague tandis qu’il faisait un grand signe de croix, et un grand salut au maître-autel.

— Au revoir, madame.

— Au revoir, monsieur.

Il s’éloigna, mais, avant de franchir le seuil de l’église, il jeta un coup d’œil furtif en arrière : madame Manolé ne s’était pas agenouillée ; elle errait comme dans un musée, regardant les vitraux et les ornements… Une protestante, sans doute : elle ne savait pas faire le signe de la croix.

Madame Lassauguette retrouva Fanny sur le banc de pierre.

— Déjà revenue ? Eh bien, c’est fait. Nous irons demain chez le notaire. Es-tu contente ?

— Très contente, et très reconnaissante.

— Tu seras tout à fait chez toi, et moi, à l’autre bout du monde, je saurai que tu as enfin, quoi qu’il arrive, un refuge… Ne me remercie pas. Je te devais bien ça, ma pauvre enfant, et au souvenir de ton père… Sais-tu que madame de Chanteprie a fait d’abord toute espèce de difficultés ? Elle a dit que son fils s’était engagé sans réfléchir ; qu’il n’avait pas pu, sérieusement, me promettre des avantages invraisemblables… Ah ! cette mère !… Une femme jaune, séchée, glacée, terrible… Et cette maison ! De grandes pièces mal éclairées, humides, où des portraits vous regardent dans le noir… Je plains le jeune homme qui est obligé de vivre là !

— Ne le plaignez pas ! Je crois qu’il est très heureux.

— Il te l’a dit ?… Vous en êtes aux confidences ?…