Page:Tinayre - La Maison du péché, 1941.djvu/102

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vous souhaitez vous convertir, il faudrait quitter pour quelques mois M. de Chanteprie. Vous pourriez faire une retraite dans un couvent…

— Oh ! non.

— Pourquoi ?

— Je ne veux pas quitter Augustin.

— Eh bien, prenez garde qu’il ne vous quitte, lui, le premier… Sa religion intransigeante ne lui permet aucun accommodement avec le Ciel… Étudiez-le bien : c’est une âme tout d’une pièce, naïve, sublime, impitoyable… Si vous vous mettiez entre Dieu et lui, il marcherait sur vous pour aller à Dieu ; il marcherait sur sa mère !…

— Vous me désespérez.

— Je vous avertis.

— Et vous ne pouvez rien de plus pour moi ?

— Rien de plus.

— Vous refusez encore de me convertir ?

— J’y serais inhabile… Il n’y a pas au monde que M. Le Tourneur et moi. Cherchez un autre directeur, et rappelez-vous mon conseil. Allez au couvent.

— Comme Ophélie… Grand merci ! Je resterai aux Trois-Tilleuls. »

« Quel étrange prêtre que cet abbé Vitalis ! songeait Fanny en remontant la côte du Chêne-Pourpre. Ah ! ce n’est pas un enthousiaste ! Mais l’abbé Le Tourneur, non plus, n’est pas un enthousiaste, ni ce gros abbé Chavançon qu’on m’a présenté l’autre jour, chez les Courdimanche… »

Aux Trois-Tilleuls, elle trouva Augustin. Il dit son inquiétude : Mme de Chanteprie ne pouvait plus marcher. Le médecin lui ordonnait expressément les eaux d’une station thermale des Basses-Pyrénées, récemment mise à la mode par des couvents qui recevaient des pensionnaires. Il insistait même pour que Mme Angélique restât dans le Midi au moins six semaines. Devant l’obstiné refus de la malade, Augustin songeait à faire intervenir l’abbé Le Tourneur.

« J’admire le courage de ma mère. Elle accepte la souffrance comme une grâce purificatrice. Pour un peu, elle dirait qu’un chrétien doit rougir de n’être point malade, et qu’une trop bonne santé est une honte aux personnes pénitentes. Elle supporte ses