Page:Tinayre - La Maison du péché, 1941.djvu/110

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Septembre s’acheva. Les rosiers remontants donnèrent leurs dernières roses, et, dans les jardinets rustiques, parmi la fumée rousse et blonde des feuillages d’asperges, fleurissaient encore les dahlias simples, les coréopsis de velours jaune tachés de brun, les pétunias à croix violette sur fond blanc, à fine odeur de girofle, et la charmante fleur de la chicorée sauvage, l’étoile bleu lilas collée à la tige rigide d’un vert frais… Dans les chemins creux, où les troènes mêlaient leurs haies noires aux baies de corail pâle des fusains, Fanny trouvait encore quelques girolles épanouies comme des jacinthes, tordues comme des trompes d’or à large pavillon ; mais elle préférait chercher, sous bois, les gros cèpes de cuir rougeâtre, et sur le velours tendre des prairies, les petits mousserons secs, les agarics à feuillets roses, à tête blanche, couleur d’écorce de bouleau… Elle ramassait des petites plantes, des bestioles bizarres, des cailloux joliment veinés. Augustin l’accompagnait dans ces promenades quotidiennes sur le plateau, dans la forêt, dans les vallons dont la beauté printanière, maintenant disparue, s’unissait à jamais, dans sa mémoire, aux premières émotions de son amour. Une vapeur laiteuse, imprégnée de lumière, flottait sous le ciel d’azur et d’argent, sur les coteaux boisés où se mariaient déjà tous les tons du vert, de la rouille et de l’ocre. Les poiriers étaient d’un rouge de cuivre, les chênes d’un rouge de sang, et les petits peupliers tout en filigrane d’or. Les champs labourés avaient des nuances de cendre rose. On voyait partout des tas de pommes, dont l’odeur emplissait les cours de ferme, les