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troncs noirs, sur l’étang moiré d’un frisson rose.

Jacqueline redescendait vers la terrasse dont les tilleuls avaient vu et ses jeunes amours et les anciennes amours de couples qui s’étaient promenés là, par les beaux printemps de l’autre siècle. Au loin, Paris s’étendait, tel qu’elle l’avait contemplé du haut des Buttes-Chaumont, coupé par le fleuve et submergé dans la vapeur violette du couchant. Là-bas, dans cet océan de pierres, à un point précis qu’elle pouvait déterminer, vivait sans elle, loin d’elle, celui qui était son unique pensée, son tourment et son amour.

Jacqueline revenait à la villa, tout imprégnée de la mélancolie de ces promenades quand, un soir, on lui remit la Revue des Arts. Avant le repas, aux dernières lueurs du jour qui s’éteignait, elle chercha l’article d’Étienne. Une note indiquait qu’une indisposition de M. Chartrain privait le journal de sa collaboration si appréciée. La jeune femme s’alarmait déjà ; mais, en feuilletant la revue, son regard tomba sur des vers inédits, signés d’un X et dont le premier quatrain lui rappela presque douloureusement sa dernière rencontre avec Étienne, sous les marronniers du Luxembourg.