Page:Tinayre - La Rancon.djvu/295

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Je suis nerveuse à l’excès depuis quelques mois, dit-elle en s’adossant au clavier. Et puis, ce triste temps, cette musique… Si l’expression n’était pas ridicule, je dirai que j’ai mal à l’âme.

Le peintre la regardait d’un air singulier où se mêlaient l’anxiété, la compassion, une curiosité affectueuse. Elle reprit :

— J’espère que le voyage d’Algérie me fera du bien.

— Vous partez bientôt ?

— Dans quinze jours.

— Chartrain le sait ?

Elle ne songea pas à s’étonner de cette question.

— Oui, Paul lui a écrit hier.

Elle se leva et vint s’asseoir sur le divan, près de Moritz, comme pour rendre plus facile la transition des banalités aux confidences. Moritz, ému, hésitait sous l’interrogation silencieuse de son regard. Et tout à coup, oubliant peut-être une phrase longuement préparée :

Je souhaite, dit-il, que ce voyage vous rende la santé et la gaieté. Vous en avez besoin, ma chère amie… Chartrain fait les mêmes vœux. Je le quitte à l’instant et nous avons beaucoup parlé de vous.