Page:Tinayre - La Rancon.djvu/55

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Leurs robes répétaient les couleurs du soir, et leurs beautés, aux violents contrastes, prenaient dans l’ombre un charme plus harmonieux. Suzanne Mathalis, assise en arrière, la tête tournée vers l’invisible, était vêtue du même vert céleste que le jour déjà fugitif. Une cendre fine éteignait les reflets sur la tête blonde d’Anna Lachaume, et sa robe cerclée de dentelles plus molles que des nuées rappelait le mauve indécis du ciel. Debout, la tête droite et rêveuse sous le voile partagé de ses cheveux bruns, tout enveloppée d’un vaporeux fichu de gaze noire, Jacqueline avait la grâce, le mystère d’une nymphe de la nuit.

— Voyez, dit tout bas Quérannes. N’est-ce pas un groupe à réjouir les amateurs de symboles ? Que préférez-vous, Chartrain ? L’adieu du jour, le charme du crépuscule, la divinité de la nuit ?

— J’ai toujours aimé la nuit, dit Étienne. Mais madame Vallier se fâcherait de la comparaison… Elle est trop jeune pour ne pas évoquer l’aurore.

— Oui, dit Lachaume, avec une intention un peu libre, l’aurore d’une nuit d’amour.

Riant de son mot, il appela sa femme. Ce fut le tumulte du départ, les préparatifs, les adieux, les recommandations affectueuses de revenir bientôt.