Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/238

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soleil… et un coin de bleu, entre les nuages… Allons !

La voiture s’éloigna.

C’était un jour sec et brûlant qui sentait la poussière, le foin, les roses. Josanne, dès les premiers pas, sur le chemin en pente raide, fut écrasée par la chaleur. Sa jupe de toile blanche, si légère, entravait sa marche ; la mousseline de sa blouse lui collait aux épaules. Elle avait un peu de vertige, à chaque mouvement.

La veille et l’avant-veille, elle avait dû garder le lit, pendant que la Tourette, en désarroi, organisait tant bien que mal la vie du petit Claude. Et Josanne, rétablie, conservait encore une courbature physique et morale qui la rendait moins résistante que de coutume à la fatigue et à l’émotion. Noël voulait-il la ménager ? Voulait-il lui laisser toute l’initiative d’un entretien qu’elle avait cru facile et qui, maintenant, l’effrayait ? Il avait repris, spontanément, le ton de la camaraderie fraternelle. Aucune conversation sérieuse, aucune allusion aux lettres échangées… Josanne, si brave, loin de Noël, éprouvait, devant lui, un effarement singulier, un malaise de pudeur… Il lui venait des scrupules rétrospectifs. Parfois, même, elle se défendait contre son amour, et elle souhaitait s’en tenir à l’amitié passionnée.

Ce trouble de conscience s’apaisait en ce moment, et Josanne se réjouissait d’être tranquille et gaie, comme une sœur très chérie auprès d’un grand frère. À mesure qu’ils montaient, entre les haies vives, les chaumines brunes, les bouquets de bois, la vallée de l’Yvette s’abaissait plus profondément à leur gauche. Ils aper-