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— Précisément !… La femme sans éducation, passive, inconsciente, cette femme-là, quand elle aime, est trop souvent ce que l’homme la fait…

— Et l’instinct maternel.

— L’instinct maternel résiste presque toujours aux sollicitations mauvaises… presque toujours, mais pas toujours… Il y a des femmes qui ne l’ont pas, cet instinct, et, dans l’enfant, elles aiment, d’abord, le père de l’enfant…

Josanne avait parlé vite, d’un trait… Elle ne vit pas un frisson de souffrance sur le visage de Noël.

Elle continua :

— L’amant de « madame Neuf » pouvait éveiller en elle l’instinct endormi. Et cette malheureuse fût devenue une mère comme tant d’autres ; elle eût aimé l’enfant de son amour…

Il y eut un silence. Josanne devina la pensée de Noël. Inquiète, elle se leva, pour allumer la lampe.

Elle se reprochait la phrase imprudente…

— Josanne, est-ce que… ?

— Dites ?

— Est-ce que vous l’aviez, l’instinct maternel, l’amour de l’enfant pour l’enfant ?

Elle maniait le verre, l’abat-jour, feignant d’être agacée :

— Comme je suis maladroite !

Puis elle resta immobile, dans la lueur rose qui fardait sa pâleur.

— Je vous en prie, ne mentez pas…

— Je ne veux pas mentir, mais… Pourquoi me posez-vous cette question ?

— Pour connaître toute votre âme…