Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/368

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Elle l’associait à sa douleur comme à son espoir maternel.

Le soir, la fièvre redoubla. L’inégalité des pupilles, la rigidité de la nuque, les cris, le délire, tous les symptômes qu’avait annoncés le docteur reparurent, aggravés. Josanne si déprimée pendant le jour, retrouva son énergie farouche. Elle interdit la chambre de Claude à la Tourette dont elle ne supportait plus les pleurs et les lamentations. Elle voulait être seule, avec Noël.

— Tu m’aideras. Mais personne, personne, excepté toi, ne touchera mon enfant… Je ne veux pas qu’on me console ; je ne veux pas qu’on me plaigne. Je ne veux pas qu’on me regarde souffrir. Toi seulement…

Elle ne pleurait pas. Elle était, comme la nuit précédente, insensible et pétrifiée. Et Noël n’osait lui parler, lui enlever cette force incompréhensible qui s’accroissait avec le danger de l’enfant.

À minuit, ils attendaient le médecin. Josanne dit tout à coup :

— C’est inutile…

Noël demanda :

— Qu’est-ce qui est inutile ?

— C’est inutile que le docteur vienne, et tourmente le petit…

— Pourquoi ?

Elle haussa les épaules. D’un geste incertain, elle relevait ses cheveux ; et ses yeux sans larmes, où la pupille noire s’élargissait, où l’iris n’était plus qu’un fil bleuâtre, avaient quelque chose d’anormal, d’indéfinissable, comme les yeux des fous.