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et belles moulures chantournées, des cheminées gracieuses, en marbre de couleur. Pas d’autre luxe. Les habitantes du logis ne devaient pas songer que le « seigneur polonais » fût bien riche.

Combien de jolies filles passèrent, pour quelques semaines ou quelques mois, dans cette maison dont un financier n’aurait pas voulu pour sa « folie » ? Nul ne peut le dire, mais on sait qu’elles n’y furent jamais plus d’une ou deux à la fois, avec l’intendante — la « mère abbesse » dit Mme du Hausset, et les domestiques. La première fut cette Murphy que le duc de Luynes appelle Morphise, ravissante fille, qui avait désappris la pudeur en posant les nymphes dans l’atelier de Boucher. Quatorze ou quinze ans, un petit corps enfantin et féminin, souple et bien en chair, veiné de bleu, avivé de rose, où sur la douce soie de la peau, la lumière nacrée jouait comme une caresse, un visage puéril, aussi frais qu’une fleur sous la rosée, le rire et l’accent de Paris, l’humeur « folâtre » si reposante pour un homme las et blasé. Cette fillette devient mère, et sa maternité, qui la rend plus éclatante, rend plus vif le caprice du Roi. Il la fait venir à Versailles, la montre à ses familiers. Bientôt, elle n’est plus la petite Murphy, fille d’une revendeuse à la