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LA VIE AU HAREM

Celle qui parle est une femme d’âge indécis, grasse, la face ronde, un peu molle et poudrerizée sous un énorme bouffant de cheveux mi-roux mi-châtains, mi-naturels mi-factices. Les yeux clairs, rieurs et doux, malgré la fatigue des paupières, soulignés d’un trait de khol. Aux oreilles, de très belles émeraudes ; au cou, un collier de grosses perles ; des bagues somptueuses aux mains courtes, fines et potelées. Cette personne, — Mélek Hanoum, « madame Ange » — porte une robe en velours souple, d’un vert vif, très ornée et doublée de faille épaisse qui froufroute.

Le salon de la villa est badigeonné à la chaux bleue. Madame Ange a laissé les divans traditionnels, couverts de simple toile bise et garnis de longs coussins plats. Un piano droit, une table, deux ou trois sièges dépareillés ; un poêle en fonte commune, dont le tuyau coudé fait un vilain angle noir à travers la pièce claire ; sur le mur, la photographie d’un vieux monsieur turc, très chamarré, très vénérable, le propre père de madame Ange ; la photographie de