Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 1.djvu/305

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La force irrésistible de la justice, dans les pays où la souveraineté n’est point partagée, vient de ce que les tribunaux, dans ces pays, représentent la nation tout entière en lutte avec le seul individu que l’arrêt a frappé. À l’idée du droit se joint l’idée de la force qui appuie le droit.

Mais dans les pays où la souveraineté est divisée, il n’en est pas toujours ainsi. La justice y trouve le plus souvent en face d’elle, non un individu isolé, mais une fraction de la nation. Sa puissance morale et sa force matérielle en deviennent moins grandes.

Dans les États fédéraux, la justice est donc naturellement plus faible et le justiciable plus fort.

Le législateur, dans les confédérations, doit travailler sans cesse à donner aux tribunaux une place analogue à celle qu’ils occupent chez les peuples qui n’ont pas partagé la souveraineté ; en d’autres termes, ses plus constants efforts doivent tendre à ce que la justice fédérale représente la nation, et le justiciable un intérêt particulier.

Un gouvernement, de quelque nature qu’il soit, a besoin d’agir sur les gouvernés, pour les forcer à lui

    -Hampshire crut devoir changer les termes de la charte originaire, et transporta à de nouveaux administrateurs tous les droits, priviléges et franchises qui résultaient de cette charte. Les anciens administrateurs résistèrent, et en appelèrent à la cour fédérale, qui leur donna gain de cause, attendu que la charte originaire étant un véritable contrat entre l’État et les concessionnaires, la loi nouvelle ne pouvait changer les dispositions de cette charte sans violer les droits acquis en vertu d’un contrat, et en conséquence violer l’article 1er , section x, de la constitution des États-Unis.