Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/332

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bitants de la Nouvelle-Angleterre. Le travailleur libre perdant ainsi au Sud une partie de sa supériorité sur l’esclave, il est moins utile d’abolir l’esclavage.

Toutes les plantes de l’Europe croissent dans le nord de l’Union ; le Sud a des produits spéciaux.

On a remarqué que l’esclavage est un moyen dispendieux de cultiver les céréales. Celui qui récolte le blé dans un pays où la servitude est inconnue ne retient habituellement à son service qu’un petit nombre d’ouvriers ; à l’époque de la moisson, et pendant les semailles, il en réunit, il est vrai, beaucoup d’autres ; mais ceux-là n’habitent que momentanément sa demeure.

Pour remplir ses greniers ou ensemencer ses champs, l’agriculteur qui vit dans un État à esclaves est oblige d’entretenir durant toute l’année un grand nombre de serviteurs, qui pendant quelques jours seulement lui sont nécessaires ; car, différents des ouvriers libres, les esclaves ne sauraient attendre, en travaillant pour eux-mêmes, le moment où l’on doit venir louer leur industrie. Il faut les acheter pour s’en servir.

L’esclavage, indépendamment de ses inconvénients généraux, est donc naturellement moins applicable aux pays où les céréales sont cultivées qu’à ceux où on récolte d’autres produits.

    Attakapas, un certain nombre de paysans des Açores. L’esclavage ne fut point introduit parmi eux ; c’était un essai. Aujourd’hui ces hommes cultivent encore la terre sans esclaves ; mais leur industrie est si languissante, qu’elle fournit à peine à leurs besoins.