Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/379

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vallées contiennent autant d’hommes qu’en renfermait l’Union tout entière en 1790. La population s’y élève à près de quatre millions d’habitants[1]. La ville de Washington a été fondée en 1800, au centre même de la confédération américaine ; maintenant, elle se trouve placée à l’une de ses extrémités. Les députés des derniers États de l’Ouest[2], pour venir occuper leur siège au Congrès, sont déjà obligés de faire un trajet aussi long que le voyageur qui se rendrait de Vienne à Paris.

Tous les États de l’Union sont entraînés en même temps vers la fortune ; mais tous ne sauraient croître et prospérer dans la même proportion.

Au nord de l’Union, des rameaux détachés de la chaîne des Alléghanys s’avançant jusque dans l’océan Atlantique, y forment des rades spacieuses et des ports toujours ouverts aux plus grands vaisseaux. À partir du Potomac, au contraire, et en suivant les côtes de l’Amérique jusqu’à l’embouchure du Mississipi, on ne rencontre plus qu’un terrain plat et sablonneux. Dans cette partie de l’Union, la sortie de presque tous les fleuves est obstruée, et les ports qui s’ouvrent de loin en loin au milieu de ces lagunes ne présentent point aux vaisseaux la même profondeur et offrent au commerce des facilités beaucoup moins grandes que ceux du Nord.

À cette première infériorité qui naît de la nature s’en joint une autre qui vient des lois.

  1. 5,672,317, dénombrement de 1830
  2. De Jefferson, capitale de I’État de Missouri, à Washington, on compte 1,019 milles, ou 420 lieues de poste. (American Almanac, 1831, p 48.)