Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 3.djvu/198

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toujours une association dont ses lecteurs habituels sont les membres.

Cette association peut être plus ou moins définie, plus ou moins étroite, plus ou moins nombreuse ; mais elle existe au moins en germe dans les esprits, par cela seul que le journal ne meurt pas.

Ceci nous mène à une dernière réflexion qui terminera ce chapitre.

Plus les conditions deviennent égales, moins les hommes sont individuellement forts, plus ils se laissent aisément aller au courant de la foule, et ont de peine à se tenir seuls dans une opinion qu’elle abandonne.

Le journal représente l’association ; l’on peut dire qu’il parle à chacun de ses lecteurs au nom de tous les autres, et il les entraîne d’autant plus aisément qu’ils sont individuellement plus faibles.

L’empire des journaux doit donc croître à mesure que les hommes s’égalisent.