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VOYAGE EN ALGÉRIE.

nant quatre années d’études et plus appropriée aux besoins du pays.

Je demande pourquoi le fond de l’instruction est classique ?

Il règne, me dit-on, une prodigieuse mobilité dans le personnel des élèves. La plupart ne font que passer quelques mois dans le collége ; ce sont des fils d’officiers qui viennent d’Europe et y retournent. Les élèves manqueraient une éducation commencée, ou n’en commenceraient pas une qu’ils pussent finir, si le système d’éducation française n’était pas suivi…

Le directeur de ce collége se plaint à moi de ce qu’on n’empêche pas l’évêque d’avoir quelques élèves dans un petit séminaire. L’évêque élève de jeunes Arabes à trois cents francs par an. Comment pourrions-nous supporter la concurrence ? (En effet, il est très-fâcheux qu’on puisse donner l’instruction à bon marché !)

Du reste, le collége n’a pas un élève arabe. On dit qu’il en aurait s’il pouvait donner des bourses : j’en doute.

J’ai vu ce même jour la Bibliothèque. Il s’y trouve d’assez beaux manuscrits arabes, pris la plupart à Constantine. Beaucoup d’autres, également pris dans cette ville, ont été gaspillés et perdus. On n’a trouvé nulle part des manuscrits grecs et latins, et parmi les manuscrits arabes aucun qui apprenne rien de nouveau. J’ai vu là un jeune professeur d’arabe, élève de M. de Sacy, qui m’a paru distingué et très-intelligent.

D. Quelle différence, lui dis-je, y a-t-il entre l’arabe vulgaire et l’arabe écrit ?

R. La même, au moins, qu’entre le latin et l’italien.