crimes contre la sûreté de l’État étaient punis comme des crimes ordinaires ; qu’ainsi l’enchaînement logique qu’on voulait former n’existait pas ; que le même motif qui venait de porter la majorité à ne point modifier l’article 20 du code pénal, devait à plus forte raison l’arrêter ici ; que c’était toujours une innovation très-considérable et très-dangereuse que de créer une classe particulière de condamnés, et d’établir pour eux une peine spéciale ; que, d’ailleurs, les limites de cette classe seraient toujours fort incertaines et par conséquent très-difficiles à poser dans la loi ; qu’enfin le projet du gouvernement, en permettant au tribunaux de dispenser du travail qui, auparavant, était toujours obligatoire, apportait déjà un adoucissement notable à la législation actuelle, adoucissement qui devait suffire à tous les besoins.
La majorité de votre Commission a partagé cet avis, et elle a décidé à huit contre un qu’on ne modifierait pas le code pénal dans le sens qui avait été proposé.
Plusieurs membres ont enfin ouvert l’avis que la loi dispensât du travail les auteurs d’écrits punis par les lois relatives à la presse.
Il s’agit ici, disaient-ils, d’un délit d’une espèce absolument particulière. Sa nature est tellement intellectuelle que, par lui-même, il indique que ceux qui l’ont commis ont des mœurs et des habitudes intellectuelles. Convient-il de soumettre ces condamnés aux travaux manuels et grossiers des maisons centrales ? L’opinion publique, l’usage même de l’administration disent le contraire. Pourquoi donc ne pas introduire dans la loi une exception qui est déjà dans les mœurs ? Pourquoi exposer le juge à faillir quand on peut lui tracer une règle ? La maxime tutélaire du droit criminel, c’est que le législateur ne doit abandonner à l’appréciation des tribunaux que ce qu’il lui est impossible de décider lui-même. Ici la règle est facile à indiquer et à suivre, car les auteurs d’écrits punis par les lois de la presse forment naturellement une catégorie à part dont les limites sont toujours reconnaissables.
On répliquait : qu’il y avait, au contraire, des différences très-grandes à établir parmi les individus condamnés en vertu des lois de la presse ; que dans le nombre, figuraient notamment les auteurs de ces livres anti-sociaux qui attaquent la morale publique et les mœurs, classe particulièrement et justement flétrie par l'opinion ;