Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol10.djvu/417

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— Ah ! qu’est-ce ? dit Napoléon en remarquant que tous les courtisans regardaient quelque chose couvert d’un voile.

Beausset, avec un empressement de courtisan, sans tourner le dos, fit demi-tour, deux pas en arrière, et, en même temps, ôta le voile et prononça :

— Un cadeau à Votre Majesté, de la part de l’impératrice.

C’était, peint par Girard, le portrait, en couleurs très claires, du jeune garçon né de Napoléon et de la fille de l’empereur d’Autriche, que tous, on ne sait pourquoi, appelaient le roi de Rome. Un garçon très joli, bouclé, au regard semblable à celui du Jésus de la Madone Sixtine était représenté jouant au bilboquet. La sphère c’était le monde, et le bâton dans l’autre main représentait le sceptre. Bien que l’intention du peintre qui avait représenté le roi de Rome perçant le monde avec une baguette ne fût pas très nette, cette allégorie, aussi bien à ceux qui avaient vu le tableau à Paris, qu’à Napoléon, parut très claire et plut beaucoup.

— Le roi de Rome ! dit-il en désignant le portrait d’un geste gracieux de la main. Admirable ! Avec la capacité propre aux Italiens de changer à volonté d’expression, il s’approcha du portrait et prit un air de tendresse pensive.

Il sentait que ce qu’il dirait et ferait maintenant appartiendrait à l’histoire. Il lui semblait que le