Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol11.djvu/149

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— Camarades ! On bat les nôtres !

À ce moment le premier forgeron se souleva de terre, puis, écorchant davantage son visage ensanglanté, il s’écria d’une voix geignarde :

— Au secours ! On assassine !… On a assassiné un homme ! Frères !…

— Oh ! mes aïeux ! On a tué un homme ! cria d’une voix aiguë une femme qui sortait de la porte voisine.

La foule s’assemblait autour du forgeron ensanglanté.

— N’est-ce pas assez que tu aies pris au peuple jusqu’à la dernière chemise, dit une voix quelconque s’adressant au débitant. Quoi ! tu as encore tué un homme ! Brigand !

Le haut garçon, sur le perron, jetait des regards vagues tantôt sur le débitant, tantôt sur le forgeron. Il semblait se demander avec qui il allait se battre.

— Assassin ! cria-t-il tout à coup à l’adresse du débitant. Liez-le, mes frères.

— Comment donc !… Tu auras encore le temps de lier et moi aussi ! s’écria le débitant en repoussant les gens qui se jetaient sur lui. Et enlevant son bonnet, il le jeta à terre. Cet acte semblait avoir une importance menaçante, mystérieuse : les ouvriers qui entouraient le débitant s’arrêtèrent indécis.

— Mon cher, moi-même je connais très bien