Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol11.djvu/354

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— Tout de suite, princesse, tout de suite, mon amie. C’est son fils ? dit-elle en désignant le petit Nicolas qui rentrait avec Desalles. — Nous pouvons vous loger tous à la maison, elle est très grande. Oh ! quel délicieux enfant !

La comtesse fit entrer la princesse au salon. Sonia causait avec mademoiselle Bourienne ; la comtesse caressait l’enfant. Le vieux comte entra dans la chambre pour saluer la princesse. Il avait beaucoup changé depuis que la princesse l’avait vu.

Alors c’était un beau vieillard gai, assuré, maintenant il semblait piteux, craintif. Tout en causant avec la princesse, il regardait autour de lui, comme pour s’assurer qu’il faisait ce qu’il fallait. Après la ruine de Moscou et de son domaine, placé hors de ses habitudes, il perdait visiblement la conscience de son importance et sentait que dans la vie il n’y avait plus place pour lui.

Malgré le seul désir de la princesse de voir plus vite son frère, malgré son dépit d’être ainsi entourée en ce moment, tandis qu’on cajolait son neveu avec affectation, elle remarquait tout ce qui se faisait autour d’elle et sentait la nécessité, pour le moment, de se soumettre à ce nouveau milieu où elle pénétrait. Elle savait que tout cela était nécessaire, ennuyeux pour elle, cependant elle ne leur en voulait pas.

— C’est ma nièce, dit la comtesse en présentant Sonia. Vous ne la connaissez pas, princesse ?