Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/12

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toriens narrant comment un roi ou un empereur, après une querelle avec un autre roi ou empereur, réunit son armée pour combattre l’armée de son ennemi, remporte la victoire, tue trois, cinq, dix mille hommes et, grâce à cela, conquiert l’État et le peuple de quelques millions d’hommes, quelque incompréhensible que soit le fait que la défaite d’une armée, une centième partie de toute la force du peuple, oblige celui-ci à se soumettre, tous les faits historiques (tels que nous les connaissons) confirment l’exactitude de ce phénomène : à savoir que les succès plus ou moins grands de l’armée d’un peuple contre l’armée d’un autre peuple sont des causes ou au moins des indices essentiels de l’augmentation ou de la diminution de la force des peuples. L’armée remporte la victoire, et aussitôt, les droits du peuple victorieux augmentent au détriment du vaincu. L’armée a subi la défaite et aussitôt, selon l’importance de cette défaite, le peuple aliène certains droits ; et son armée est-elle anéantie, il se soumet entièrement.

C’est ainsi (selon l’histoire) depuis les temps les plus reculé jusqu’à nos jours. Toutes les guerres de Napoléon confirment cette règle : à cause de la défaite des troupes autrichiennes, l’Autriche est privée de ses droits, et les droits et les forces des Français sont accrus. La victoire des Français sous Iéna et Auerstadt anéantit l’indépendance de la Prusse.