Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/167

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pétait le soldat en agitant la main, et rattrapant en effet l’air de la chanson.

— Voilà, c’est malin ! Gagozozo !

Et des rires épais partaient de divers côtés.

Morel riait lui aussi.

— Eh bien ! Encore, encore !


Eut le triple talent
De boire, de se battre
Et d’être un vert galant !…


— C’est beau ! Eh ! Eh ! Allons, Zalétaïev !

— Qui… prononçait avec peine Zalétaïev. Qui… fit-il longuement en ouvrant largement la bouche. — Le triplatala de bou et de ba !… chanta-t-il.

— Ah ! c’est beau ! En voilà un Français ! Oh ! Oh ! Dis donc, veux-tu encore manger ?

— Donne-lui du gruau, il prendra le temps de calmer sa faim.

On lui donna encore du gruau et Morel, en riant, entama la troisième gamelle. Un sourire joyeux était sur tous les visages des jeunes soldats qui regardaient Morel. Les vieux soldats qui croyaient indigne de s’occuper de telles sottises s’étaient couchés de l’autre côté du bûcher mais, de temps en temps, ils s’accoudaient et regardaient Morel avec un sourire.

— Ce sont aussi des hommes, dit l’un d’eux en s’enveloppant dans sa capote. L’absinthe aussi a ses racines !