Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/192

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reçut la visite d’une ancienne connaissance, le maçon, comte Villarsky, celui même qui l’avait fait admettre dans l’ordre, en 1807. Villarsky avait épousé une riche Russe propriétaire de grands domaines dans la province d’Orel, et il occupait dans la ville une situation provisoire à l’Intendance.

En apprenant que Bezoukhov était à Orel, Villarsky, bien qu’il n’eût jamais été très lié avec lui, vint le voir et lui témoigna l’amitié et l’empressement que s’expriment ordinairement les gens qui se rencontrent dans un désert ; Villarsky s’ennuyait à Orel et était heureux d’y retrouver un homme de son monde et de sa situation (comme il le supposait).

Mais à son étonnement, Villarsky remarqua bientôt que Pierre était très en retard sur la vie actuelle et qu’il était tombé, à son point de vue, dans l’apathie et l’égoïsme.

Vous vous encroûtez, mon cher, lui disait-il. Néanmoins Villarsky avait plus de plaisir qu’auparavant en la société de Pierre et il venait le voir chaque jour. Et Pierre, en regardant Villarsky et l’écoutant, trouvait incroyable d’avoir été, récemment encore, pareil à lui.

Villarsky était marié, avait une famille, était occupé des affaires de sa femme, de sa famille et de son service, et il considérait toutes ses occupations comme un obstacle à sa vie ; il les méprisait toutes parce qu’il considérait que leur but était