Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/205

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La princesse s’avança rapidement à sa rencontre et lui tendit la main.

— Oui, fit-elle, après qu’il eut baisé sa main, en regardant fixement son visage changé, voilà comment nous nous retrouvons ! Les derniers temps il parlait souvent de vous ! fit-elle en promenant ses yeux de Pierre à la dame de compagnie avec une gêne qui, momentanément, frappa Pierre.

— J’ai été si heureuse en apprenant votre salut. C’est la seule bonne nouvelle que nous ayons reçue depuis longtemps.

De nouveau, avec encore plus d’inquiétude, la princesse regarda sa dame de compagnie et voulut dire quelque chose, mais Pierre l’interrompit.

— Imaginez-vous que je ne savais rien de lui. Je le croyais tué. Tout ce que je sais, je l’ai appris de troisième main. Je sais seulement qu’il a rencontré les Rostov. Quelle destinée !…

Pierre parlait rapidement, avec animation. Il regarda le visage de la dame de compagnie et aperçut un regard tendre, curieux, fixé sur lui, et, comme il arrive souvent pendant la conversation, il sentit, sans savoir pourquoi, que cette dame de compagnie en robe noire était une créature bonne et charmante qui ne gênerait pas sa conversation intime avec la princesse Marie.

Mais quand il prononça les dernières paroles sur les Rostov, la gêne de la princesse Marie s’accentua.