Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/292

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femme que même Sonia et la vieille comtesse, qui par jalousie, souhaitaient le désaccord entre eux, ne pouvaient trouver un prétexte à reproche. Cependant, il y avait entre eux des moments d’animosité. Parfois, précisément après une période très heureuse, une certaine animosité s’élevait entre eux ; c’était le plus souvent pendant les périodes de grossesse de la comtesse Marie. Maintenant c’était cette période.

— Eh bien ! Messieurs et mesdames, dit Nicolas d’une voix haute et feignant d’être gai (il sembla à la comtesse Marie que c’était exprès pour l’offenser), je suis sur pied depuis six heures, demain il faudra souffrir, mais aujourd’hui je veux me reposer.

Et, sans rien dire à sa femme, il alla dans le petit salon et s’allongea sur le divan.

— Voilà, c’est toujours ainsi. Il parle à tout le monde, sauf à moi ; je vois, je vois que je lui répugne, surtout en cette situation, pensa la princesse Marie.

Elle regarda son gros ventre et vit dans le miroir son visage jaune, tiré, amaigri et ses yeux plus grands que jamais. Tout lui devint désagréable : les cris et les rires de Denissov, les propos de Natacha et surtout le regard que lui jeta furtivement Sonia. Sonia était toujours la première personne que choisissait la comtesse pour déverser sa colère.