Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/62

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Si vous comptez sur la soupe du soir, vous venez trop tard, dit avec un rire contenu une voix près du bûcher.

Dolokhov répondit qu’ils n’avaient pas faim et qu’il leur faudrait la nuit même, aller plus loin. Il confia les chevaux au soldat qui surveillait la marmite et s’accroupit près du bûcher, à côté de l’officier au long cou.

Cet officier regardait Dolokhov sans baisser les yeux ; il lui demanda de nouveau de quel régiment il était. Dolokhov, feignant de ne pas entendre, alluma une courte pipe française qu’il tira de sa poche et se mit à questionner les officiers afin de savoir si la route était libre de Cosaques.

Les brigands sont partout ! répondit l’officier qui était de l’autre côté du bûcher.

Dolokhov exprima que les Cosaques n’étaient dangereux que pour les retardataires comme eux, mais non pour un grand détachement, et que, probablement, ils n’oseraient attaquer.

Personne ne répondit.

« Eh bien ! Maintenant il va partir, » pensait à chaque instant Pétia, qui, debout devant le bûcher, écoutait la conversation.

Mais Dolokhov reprit de nouveau la conversation et se mit à demander tout carrément combien ils avaient d’hommes et combien de prisonniers.

En parlant des prisonniers russes qui étaient dans leur détachement, Dolokhov dit :