Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/486

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brun, ses cheveux rares, bouclés, ses yeux bleus interrogateurs, qui, au commencement, effrayaient Kitty, et ses tentatives pénibles de paraître vif et animé en sa présence. Elle se rappelait ses efforts, les premiers temps, pour vaincre la répugnance qu’elle éprouvait pour lui comme pour tous les poitrinaires, la gêne qu’elle éprouvait à inventer des conversations. Elle se rappelait les regards timides, attendris, qu’il avait pour elle ; le sentiment étrange de compassion et de souffrance, qu’elle ressentait ensuite, et la joie de se sentir bonne qu’elle en avait éprouvée.

Comme tout cela était bon ! Ce fut ainsi au début ; mais, depuis quelques jours, tout s’était gâté, Anna Pavlovna avait reçu Kitty avec une amabilité feinte et ne cessait de les observer, elle et son mari.

Était-ce sa joie touchante à son approche qui causait la froideur d’Anna Pavlovna ?

« Oui, se rappelait-elle. Anna Pavlovna n’était pas naturelle, elle n’avait pas sa bonté coutumière quand, avant-hier, elle disait avec dépit : « Ah ! il vous attendait impatiemment. Il n’a pas voulu prendre le café sans vous, bien qu’il soit très faible. » Oui, il lui a même été désagréable que je lui donne son plaid. Tout cela est si simple, mais il a accepté si maladivement, il a remercié si longuement, que je me suis sentie gênée. Et puis mon portrait qu’il a si bien fait ; et surtout ce regard