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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/12

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en deux fois et de célébrer le mariage avant le carême. La princesse décida de ne préparer tout d’abord qu’une partie du trousseau : la lingerie, et d’envoyer le complément par la suite ; elle eut à ce sujet de grandes discussions avec Lévine qui ne pouvait se décider à lui déclarer sérieusement s’il consentait ou non à cette combinaison, d’autant plus acceptable cependant que les jeunes mariés devaient, aussitôt après la cérémonie, partir à la campagne où ils pourraient se passer de l’autre partie du trousseau comprenant les costumes.

De son côté Lévine était toujours aussi affairé, persistant à croire que sa personne et son bonheur constituaient l’unique but de la création ; il ne pensait à rien, ne se préoccupait de rien, persuadé que les autres le suppléeraient en tout.

Il ne formulait même aucun projet, n’assignait aucun but à sa vie future ; il s’en remettait entièrement aux autres, certain d’avance que tout irait bien. Son frère Serge Ivanovitch, Stépan Arkadiévitch et la princesse étaient ses guides. Son rôle se bornait à acquiescer à tout ce qu’on lui proposait. Son frère empruntait pour lui de l’argent ; la princesse lui conseillait de quitter Moscou après le mariage, Stépan Arkadiévitch l’engageait à partir pour l’étranger. Il consentait à tout. « Faites tout ce que vous voudrez, pensait-il, je suis heureux et mon bonheur est de ceux auxquels, quoi qu’il arrive, rien ne saurait porter atteinte. »