Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol19.djvu/58

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je n’obtenais qu’une seule réponse à ma question concernant le sens de ma vie. C’était : Tu es ce que tu appelles ta vie ; tu es une agrégation provisoire, accidentelle, de molécules. L’action réciproque de ces molécules les unes sur les autres, leurs modifications, produisent en toi ce que tu appelles ta vie. Cette agrégation tiendra un certain temps, puis l’action réciproque de ces parties cessera, et avec elle cessera ce que tu appelles ta vie, ainsi que toutes tes questions. Tu es une petite masse formée par hasard, elle moisit, et la fermentation de cette masse s’appelle sa vie. La petite masse disparaîtra, la fermentation s’arrêtera, et avec elle toutes tes questions.

C’est ainsi que répondent les sciences positives. Et elles ne peuvent dire rien de plus, si elles ne s’écartent pas de leurs bases. Mais cette réponse n’est pas la réponse à ma question. Ce que j’ai besoin de savoir, c’est en quoi est le sens de ma vie ; le fait d’être une partie de l’infini ne lui donne pas de sens et détruit même tout sens possible.

Aussi vagues sont les réponses fournies par la science spéculative qui dit que le sens de la vie consiste dans le développement et la contribution à ce développement. Ces réponses sont trop inexactes et trop vagues pour être considérées comme telles.

D’autre part, la science spéculative, quand elle se tient strictement à ses bases et répond directement à la question, donne toujours et partout la