Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol24.djvu/117

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qu’on peut et qu’on doit ne point l’observer.

On dit que Christ sanctionna lui-même le serment devant les tribunaux quand aux paroles du grand prêtre : « Je t’adjure par le Dieu vivant », il répondit : « Tu l’as dit » ; que l’apôtre Paul invoqua Dieu en témoignage de la vérité de ses paroles, ce qui est évidemment le même serment ; on dit que la loi de Moïse prescrivant le serment n’a pas été abrogée par le Seigneur ; on dit aussi que seuls sont défendus les faux serments, les serments hypocrites, pharisiens.

Ayant saisi le sens et le but de ces explications, je compris que le commandement de Christ concernant le serment est loin d’être insignifiant, facile à pratiquer et superficiel, comme cela m’avait semblé quand j’exceptais du serment défendu par Christ le serment de fidélité à l’État.

Et je me demandai : N’est-ce pas là qu’on interdit aussi ce serment que les commentateurs de l’Église mettent tant d’acharnement à justifier ? N’y a-t-il pas ici la défense de prêter serment, ce serment sans lequel serait impossible la division des hommes en États, sans lequel serait impossible la caste militaire ? Le soldat c’est l’homme qui commet toutes les violences, et qu’on appelle même « Le serment ». Si j’avais causé avec un grenadier pour savoir comment il résolvait la contradiction entre l’Évangile et le règlement militaire, il m’aurait répondu qu’il avait prêté serment, c’est-à-