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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/443

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comme si elle était réelle. Je perds absolument la conception de la différence entre ce qui est ma vraie propriété, laquelle en effet je puis améliorer, qui peut me servir et qui reste toujours en mon pouvoir, et ce qui n’est pas et ne peut être ma propriété quelque nom que je lui donne, et qui ne peut être l’objet de mon activité.

Les paroles ont toujours un sens clair tant qu’on ne leur donne pas un sens faux.

Que signifie la propriété ? La propriété signifie ce qui est donné, ce qui m’appartient exclusivement, dont je peux toujours disposer à mon gré, ce que personne ne peut m’ôter, qui reste à moi jusqu’à la fin de ma vie et ce que je dois précisément employer, augmenter, améliorer.

Pour chacun, une telle propriété c’est soi seul. Et cependant, dans le même sens, on considère ordinairement la propriété imaginaire, celle au nom de quoi (pour faire l’impossible : rendre réelle cette propriété imaginaire) se passe tout le mal terrible du monde : les guerres, les supplices, les tribunaux, les prisons, le luxe, la débauche, le meurtre et la perte de l’humanité.

Alors que résultera-t-il de ce qu’une dizaine d’hommes laboureront, couperont le bois, vendront les bottes, non par misère, mais par la conscience que l’homme a besoin de travailler et que plus il travaillera mieux ce sera ? Il en résultera qu’une dizaine ou moins, un seul homme, dans sa