Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/488

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c’est contraire à notre raison et à notre cœur, et ce ne peut être si nous sommes des hommes vivants. Pourquoi ne pas espérer que nous comprendrons qu’il n’y a pas chez nous un seul devoir, sans parler déjà de devoirs personnels envers nous-mêmes, des devoirs de famille, sociaux, politiques, scientifiques, qui soit plus important que celui-ci ? Pourquoi ne pas penser qu’enfin nous le comprendrons ? Peut-être parce que faire cela serait un bonheur trop grand. Pourquoi ne pas penser qu’un jour les hommes s’éveilleront et comprendront que tout le reste est séduction et que c’est la seule œuvre de la vie ? Et pourquoi ce jour ne sera-t-il pas maintenant à Moscou ? Pourquoi ne pas espérer qu’avec les sociétés, l’humanité, il se produise la même chose qu’avec un organisme malade, quand tout à coup arrive le moment de la guérison ? L’organisme est malade, cela signifie que les cellules cessent de produire leur travail mystérieux. Les unes meurent, les autres sont frappées, les troisièmes restent indifférentes, travaillent pour elles. Mais tout à coup, chaque cellule vivante commence un travail indépendant de la vie. Elle fait sortir les morts, elle circonscrit les contaminées par une barre vivante, elle communique la vie aux malades ; le corps ressuscite, il est plein de vie.

Pourquoi donc ne pas penser, ne pas espérer que les cellules de notre société se ranimeront et ra-