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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol36.djvu/196

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le neveu, était de son avis, et narrait le sujet d’un autre article du même journal.

Missy, comme toujours, était très distinguée, et portait une toilette d’une élégance discrète et sobre.

— Vous êtes probablement épuisé de faim et de fatigue ? — dit-elle à Nekhludov, quand il eut achevé son potage.

— Non, pas trop. Et vous ? Êtes-vous allée voir ces tableaux ? — demanda-t-il.

— Non, nous avons remis à plus tard. Nous sommes allés au lawn-tennis chez les Salamatov. Et c’est bien vrai, vous savez, que Mister Crooks joue admirablement.

Nekhludov était venu ici pour se distraire, et, d’ordinaire, dans cette maison, il se sentait très bien, non seulement à cause du bon ton et du luxe, qui agissaient toujours très agréablement sur lui, mais aussi à cause de cette atmosphère de flatterie caressante dont, imperceptiblement, on l’enveloppait. Mais aujourd’hui, chose singulière, tout dans cette maison lui déplaisait ; tout, depuis le portier, le large escalier, les fleurs, les laquais, la décoration de la table, jusqu’à Missy elle-même, qui, aujourd’hui, lui paraissait peu séduisante et affectée. Il était choqué du ton suffisant, vulgaire, libéral, de Kolossov ; de la personne bovine, sensuelle, bestiale du vieux Kortchaguine ; des citations françaises de la slavophile Catherine Alexéïevna ; des