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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol36.djvu/255

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paquet de vieux tapis valant ensemble trois roubles soixante-sept kopeks. L’acte d’accusation mentionnait qu’un agent avait arrêté le garçon au moment où il s’enfuyait avec son camarade qui portait les tapis sur son dos. Ils avaient fait des aveux complets et, tous les deux, avaient été mis en prison. Le compagnon du prévenu, un serrurier, y était mort ; c’est pourquoi celui-ci comparaissait seul devant le jury. Les vieux tapis figuraient sur la table des pièces à conviction.

Le procès suivit les mêmes phases que celui de la veille, avec tout l’arsenal de preuves, de témoins, de serments, d’interrogatoires, d’expertises. L’agent qui avait arrêté l’accusé répondait à toutes les questions du président, du substitut, de l’avocat : « Parfaitement bien. » « Je ne puis le savoir. » Et de nouveau : « Parfaitement bien. »… Mais malgré son abrutissement et son automatisme militaires, on voyait qu’il plaignait l’accusé et racontait sans grand désir sa capture.

Le second témoin, un petit vieillard, propriétaire de la maison où le vol avait été commis, et des tapis, un homme bilieux, répondait avec une mauvaise volonté évidente qu’il reconnaissait bien les tapis ; et, quand le substitut lui demanda quel emploi il avait l’intention de faire de ces tapis et s’ils lui étaient d’un grand usage, il répondit d’un ton irrité :

« Si j’avais su avoir tant d’ennuis pour ces tapis,