Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol36.djvu/54

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alors déclaré que s’il en était ainsi, il n’y aurait pas de dîner, qu’il ne devrait point compter dîner chez lui. Il était parti là-dessus et il avait peur qu’elle ne mît sa menace à exécution, sachant que d’elle on pouvait s’attendre à tout.

« Voilà, vivez donc honnêtement et moralement », songeait-il en considérant le gros président, gonflé de santé et de bonne humeur, qui, les coudes écartés, lissait, de ses belles mains blanches, les poils fournis et soyeux de ses grands favoris et les étalait ensuite de chaque côté de son col galonné. « Il est toujours content, joyeux, et moi je n’ai que des ennuis. »

À ce moment entra le greffier, qui venait apporter au président un dossier quelconque.

— Je vous remercie, — dit le président, et il alluma une cigarette. — Eh bien, par quelle affaire allons-nous commencer ?

— Je pense, par l’empoisonnement, répondit le greffier d’un ton qui semblait indifférent.

— C’est bon, va pour l’empoisonnement, — fit le président, calculant que cette affaire assez simple serait finie vers quatre heures, et qu’ainsi il pourrait s’en aller. — Et Matveï Nikititch, arrivé ?

— Pas encore.

— Et Brevé ?

— Il est là, répondit le greffier.

— Si vous le rencontrez, dites-lui que nous commençons par l’empoisonnement.