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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/208

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la table, sonna et donna l’ordre d’introduire Nekhludov.

Il se rappelait l’affaire de ces sectaires. Il avait déjà sur sa table leur pétition. Voici en quoi consistait cette affaire : Des chrétiens, qui s’étaient séparés de l’orthodoxie, avaient été exhortés d’abord, puis jugés. Le tribunal les avait acquittés. Alors, l’archevêque et le gouverneur, s’appuyant sur ce fait que le mariage célébré suivant leurs rites était illégal, avaient décidé de déporter, en les séparant les uns des autres, les maris, les femmes, les enfants. C’étaient ces pères et ces femmes qui demandaient à n’être point séparés. Toporov se souvenait de cette affaire, quand il en avait été saisi la première fois. Alors il s’était demandé s’il ne fallait point mettre fin à ces poursuites. Mais comme on ne risquait rien en donnant l’ordre de disséminer en divers lieux les membres d’une même famille de paysans, tandis que les laisser dans leur pays natal pouvait avoir de regrettables conséquences : entraîner au schisme le reste de la population, et comme en outre cette affaire mettait en évidence le zèle de l’archevêque, il l’avait laissé suivre son cours.

Maintenant, avec un défenseur comme Nekhludov, qui avait des relations à Pétersbourg, l’affaire pouvait être présentée à l’empereur sous un jour particulier, comme quelque chose de très cruel ; ou encore, la presse étrangère pouvait s’en