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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/118

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Oh ! monsieur, c’est affreux ! Mais quels gaillards vos soldats, quels gaillards ! C’est un plaisir, que de se battre avec des gaillards comme eux.

Il faut avouer que les vôtres ne se mouchent pas du pied non plus, — dit l’officier de cavalerie en saluant et en s’imaginant qu’il était charmant.

Mais assez.

Regardez plutôt ce gamin de dix ans, coiffé d’une vieille casquette, celle de son père sans doute, les pantalons de coton relevés sur ses jambes nues, retenus par une seule bretelle ; dès l’armistice, il est sorti derrière les remparts et se promène dans les terrains creux, examinant avec une curiosité stupide les Français et les cadavres qui gisent sur la terre, et il ramasse des fleurs champêtres, bleues, dont la vallée abonde. Il retourne à la maison avec un gros bouquet et se bouche le nez à cause de l’odeur qu’apporte le vent. Il s’arrête près du tas de cadavres apportés là et longtemps regarde un terrible cadavre sans tête qui gît près de lui. Il reste assez longtemps, s’approche plus près et touche du pied le bras étendu, raidi, du cadavre. Le bras s’agite un peu. Il pousse de nouveau plus fort, le bras s’agite de nouveau, revient à sa place. Le gamin pousse un cri, cache son visage dans les fleurs, et, en toute hâte, s’enfuit vers la forteresse.

Oui, les drapeaux blancs flottent sur les tranchées et les bastions, la vallée fleurie est jonchée