Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/333

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la poitrine, cria vivat ! et ensuite, attrapant le comte par les jambes, se mit à lui raconter que sur deux mille roubles il ne lui en restait que cinq cents et qu’il pouvait faire tout ce qu’il voulait pourvu seulement que le comte le lui permît. Le vieux père de famille s’éveilla et voulait partir, mais on ne le laissait pas. Le joli jeune homme suppliait la tzigane de danser une valse avec lui. Le cavalier, pour se flatter de son amitié avec le comte, se leva de son coin et enlaça Tourbine.

— Ah ! toi mon cher, — lui dit-il, — pourquoi donc nous as-tu quittés ? Hein ! — Le comte se tut songeant visiblement à autre chose, — Où es-tu allé ? Ah ! coquin, je sais où tu es allé !

Cette familiarité ne plut pas à Tourbine. Sans sourire, il regarda en silence le visage du cavalier et tout à coup lui lança une injure si violente, si grossière, que le cavalier attristé, de longtemps ne sut comment la prendre, en plaisanterie ou non. Enfin il décida que c’était une plaisanterie, sourit et retourna près de la tzigane et lui jura de l’épouser absolument après Pâques.

On chanta une autre chanson, une troisième. On dansa encore une fois et tout continuait à paraître très gai. Le champagne ne tarissait pas. Le comte buvait beaucoup. Ses yeux étaient humides, mais il ne titubait pas, dansait mieux que jamais, parlait d’une voix ferme et même dans le chœur accompagna très bien Stiochka quand elle chanta :