Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/319

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nements importants arrivèrent dans notre vie de famille ; mais tous deux ne changèrent pas ma vie : c’était la naissance de mon premier enfant et la mort de Tatiana Sémionovna. Les premiers temps, le sentiment maternel me prit avec tant de force et produisit en moi un enthousiasme si inattendu que je pensai qu’une nouvelle vie commençait pour moi. Mais deux mois après, quand je recommençai à sortir, ce sentiment diminua peu à peu, se transforma en habitude et en froid accomplissement du devoir.

Mon mari, au contraire, depuis la naissance de notre premier fils, redevint doux, calme, sédentaire et il reporta sur l’enfant sa tendresse et sa gaîté anciennes. Souvent, quand j’entrais en robe de bal dans la chambre de l’enfant pour le bénir pour la nuit, je trouvais mon mari près de lui et je remarquais son regard, qui ne semblait point sans reproche, fixé sur moi et j’avais honte. J’avais horreur de mon indifférence pour l’enfant et me demandais : « Suis-je pire que les autres femmes ? Mais que faire, j’aime mon fils, mais je ne puis pas rester avec lui toute la journée, cela m’ennuie, et feindre, — je ne le ferai jamais. »

La mort de sa mère fut pour lui une grande douleur. Il lui était pénible, elle partie, de vivre à Nikolskoié, et bien que je la regrettasse et compatisse à la douleur de mon mari, maintenant, la campagne m’était plus agréable. Durant ces trois