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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol5.djvu/39

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vées. J’ai voulu jouir et j’ai piétiné dans la boue tout ce qui en moi était bon.

» Je ne suis ni déshonoré ni malheureux. Je n’ai commis aucun crime, mais j’ai fait pire : j’ai tué mes sentiments, mon esprit, ma jeunesse.

» Je suis enveloppé d’un filet fangeux dont je ne puis me débarrasser et auquel je ne peux m’habituer. Je tombe sans cesse, je tombe, je sens ma chute et je ne puis m’arrêter. »




« … Et qu’est-ce qui a causé ma perte ?

» … Avais-je en moi une forte passion qui m’excusât ? Non.

» … Ils sont bons mes souvenirs !

» Un terrible moment d’égarement, que je n’oublierai jamais, me fit me ressaisir. Je fus effrayé quand je vis l’abîme infranchissable qui me séparait de ce que je voulais être, sans pouvoir l’être. Les espérances, les rêves et les pensées de ma jeunesse parurent à mon imagination.

» Où sont ces pensées claires sur la vie, sur l’éternité, sur Dieu, qui avec tant de clarté et de force emplissaient mon âme ? Où est la force de l’amour qui, d’une chaleur douce, réchauffait mon cœur ?… »

« … Ah ! comme j’aurais pu être bon et heureux si j’eusse marché dans la voie qu’à mon entrée