Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/241

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— Ah, oui, alors il ne faut pas de thé.

Ainsi disparaissait le seul résultat que la conversation avec le nouvel hôte avait eu pour le maître. Mais, en revanche, Piotr Ivanovitch était maintenant fier et heureux de son installation. Les cochers, venus pour le pourboire, le dérangèrent parce que Serge n’avait pas de petite monnaie, et Piotr Ivanovitch voulait de nouveau faire appeler le patron. Mais l’idée qu’il ne devait pas être le seul heureux ce soir, le tira d’embarras. Il prit deux billets de trois roubles, et, en en glissant un dans la main d’un des postillons : « Voilà pour vous », dit-il. (Piotr Ivanovitch avait l’habitude de dire vous à tous sans exception, sauf aux membres de sa famille). « Et voilà pour vous », dit-il en glissant furtivement l’autre billet dans la main de l’autre cocher, comme on fait en payant un docteur pour sa visite. Quand toutes ses affaires furent arrangées, on l’emmena au bain.

Sonia était assise sur un divan, la tête appuyée sur sa main. Elle se mit à rire :

— Ah ! on est bien, maman ! Ah ! comme on est bien !

Puis elle allongea ses jambes sur le divan, s’installa bien et s’endormit du sommeil doux et profond d’une robuste fille de dix-huit ans, après un mois et demi de voyage.

Natalie Nikholaievna, qui rangeait encore sa chambre à coucher, remarqua, de son oreille de