Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/254

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— Vous êtes aussi du 14 ?

— Non, du 18.

— Comment du 18 ?

— Du 18 septembre. Pour une montre d’or ; on m’a accusé de vol et j’ai souffert injustement.

Tous éclatèrent de rire, sauf le narrateur qui, de l’air le plus sérieux, regardait ses auditeurs et jurait que c’était une histoire vraie.

Aussitôt après le récit, un des hôtes de la jeunesse dorée se leva et partit au club. Il traversa les salles pleines de tables de jeu, où des vieillards jouaient au whist, la salle d’enfer, où le célèbre « Poutchine » commençait sa partie contre la « compagnie. » Il s’arrêta quelque temps près de l’un des billards où un petit vieux important avait peine à faire sa bille. Il jeta un regard dans la bibliothèque : là un général lisait lentement, à travers ses lunettes, un journal qu’il tenait loin ; et un jeune homme, invité, feuilletait toutes les revues en s’efforçant de ne pas faire de bruit.

Le jeune muscadin s’assit sur un divan, dans la salle de billard, près des joueurs, qui appartenaient comme lui à la jeunesse dorée. C’était un jour de gala, et il y avait beaucoup de messieurs, qui fréquentaient toujours le club. Parmi eux, se trouvait Ivan Pavlovitch Pakhtine. C’était un homme de quarante ans, de taille moyenne, blanc, gros, de large carrure, la tête chauve, le visage luisant, heureux, bien rasé. Il ne jouait pas mais il