Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol6.djvu/279

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parfois elle commençait à croire son frère qui affirmait que Natalia Nikolaievna était la meilleure des femmes et son ange gardien. Et elle l’enviait, elle lui semblait une mauvaise personne.

Elle se leva, passa au salon et s’apprêtait à aller dans son cabinet quand la porte s’ouvrit, et la tête grise, ridée de madame Biécheva parut dans la porte avec l’expression d’une horreur joyeuse.

— Ah ! préparez-vous, Maria Ivanovna ! — dit-elle.

— Une lettre ?

— Non, davantage… — Mais avant qu’elle eût achevé on entendit, dans l’antichambre, une haute voix d’homme.

— Mais où est-elle ? Va, toi, Natacha.

— C’est lui ! — prononça Maria Ivanovna. Et d’un pas large et ferme, elle s’approcha de son frère. Elle les aborda comme si elle les avait vus la veille.

— Quand es-tu arrivé, et où vous êtes-vous arrêtés ? Comment êtes-vous venus ? En voiture ? Voilà ce que lui demandait Maria Ivanovna en passant avec lui au salon. Sans écouter ses réponses, elle regardait tantôt l’un, tantôt l’autre.

Madame Biécheva était étonnée de ce calme, de cette indifférence et ne l’approuvait pas. Tous souriaient. Les interrogations cessèrent. Maria Ivanovna regarda sérieusement, en silence, son frère.