Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/252

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Le chef de bataillon comprit la joyeuse ironie et se mit à rire.

— On ne nous chasserait pas même du Champ de Mars.

— Quoi ? — fit le commandant.

À ce moment, sur la route venant de la ville, où étaient placés des fantassins en vedette, apparurent deux cavaliers. C’était un aide de camp suivi d’un Cosaque.

L’aide de camp était envoyé de l’état-major pour préciser au commandant du régiment ce qui, dans l’ordre d’hier, n’était pas clair, c’est-à-dire que le commandant en chef désirait voir le régiment tel qu’il était dans les marches : en capotes, les armes dans les gaînes et sans aucun apprêt.

La veille, un membre du Conseil supérieur de la guerre était arrivé de Vienne chez Koutouzov, avec la proposition et la demande de rejoindre au plus vite l’armée de l’archiduc Ferdinand et de Mack ; Koutouzov ne trouvait pas cette union avantageuse. Entre autres preuves à l’appui de son opinion, il avait l’intention de montrer au général autrichien le triste état dans lequel les troupes arrivaient de la Russie. À cet effet, il voulait précisément aller à la rencontre du régiment, de sorte que plus l’état du régiment serait déplorable, plus ce lui serait agréable. L’aide de camp, bien que ne sachant pas ce détail, transmit au commandant du régiment l’ordre absolu du commandant en chef : que les