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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol8.djvu/195

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Il l’envoya.

— Et, Votre Excellence, si je rencontre Sa Majesté avant le général en chef ? — dit Rostov, tenant la main à la visière.

— Vous pourrez demander des ordres à Sa Majesté, — répondit Dolgoroukov en interrompant vivement Bagration.

Après avoir été relevé de faction, Rostov avait pu dormir quelques heures dans la matinée ; il se sentait gai, hardi, résolu, plein d’entrain et d’assurance de bonheur ; en un mot dans cette disposition d’esprit tout semble aisé, joyeux et possible.

Ce matin, tous ses désirs se réalisaient. Une bataille générale se livrait, il y prenait part ; de plus il était ordonnance du général le plus courageux ; enfin, il était envoyé en mission près de Koutouzov et peut-être près de l’empereur lui-même. La matinée était claire, le cheval bon, son âme légère et joyeuse. Aussitôt l’ordre reçu, il lança son cheval et galopa le long de la ligne. D’abord il longea les troupes de Bagration qui n’étaient pas encore engagées dans l’affaire et se tenaient immobiles. Ensuite il entra dans l’espace occupé par la cavalerie d’Ouvarov, et ici il remarqua déjà le mouvement et les indices des préparatifs de combat. Après avoir dépassé la cavalerie d’Ouvarov, il entendit clairement devant lui les sons des canons et des mousquets. Le bruit croissait toujours.