Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol8.djvu/327

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

terrible malheur ?… Et quand cela a-t-il commencé ? Récemment encore je m’approchais de cette table avec l’idée de gagner cent roubles, d’acheter cette boîte pour la fête de maman et d’aller à la maison… J’étais si heureux, si libre, si gai. Je ne comprenais pas alors combien j’étais heureux ! Quand donc tout cela a-t-il cessé ? Quand cet état nouveau, terrible, a-t-il commencé ? Comment s’est fait ce changement ? J’étais aussi à cette même place, je choisissais aussi les cartes et regardais ces mains habiles, aux os larges. Quand donc est-ce arrivé et quoi ? Je suis sain, fort, et toujours à la même place. Non, ce n’est pas possible ! Probablement tout cela se terminera par rien. »

Il était rouge, tout en sueur, bien que dans la chambre il ne fit pas chaud. Son visage était effrayant et pénible à voir, surtout à cause de son désir de paraître calme.

Le total atteignait le nombre fatidique : quarante trois mille ! Rostov préparait la carte qui devait jouer double sur les trois mille roubles qu’on lui mettait en jeu, quand Dolokhov, en frappant la taille, la posa à côté, et, prenant la craie, commença rapidement, de son écriture nette et fine, en écrasant la craie, à calculer le résultat des sommes perdues par Rostov.

— Allons souper, il est temps de souper ! Voilà les tziganes ! En effet, des femmes et des hommes