Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol8.djvu/490

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serais pas venu ; mais j’ai une affaire… fit-il froidement.

— Non, je m’étonne seulement que tu aies pu quitter le régiment. Dans un moment je suis à vous, répondit-il à la voix qui l’appelait.

— Je vois que je suis importun, répéta Rostov.

L’expression de dépit avait déjà quitté le visage de Boris. Après réflexion, ayant évidemment décidé comment agir, avec un calme particulier, il lui prit les deux mains et l’introduisit dans la chambre voisine. Les yeux de Boris regardaient Rostov avec tranquillité et fermeté ; ils semblaient recouverts d’un voile, quelque chose comme les lunettes bleues du savoir-vivre. C’est ce qui sembla à Rostov.

— Ah ! cesse, je t’en prie ! Penses-tu être importun ? dit Boris.

Boris l’introduisit dans la chambre où était préparé le souper, le présenta aux convives, et expliqua que ce n’était pas un civil mais un officier de hussards, son vieil ami. — Le comte Gilinsky ; le comte N. N., le capitaine S. S., — disait-il, présentant ses hôtes.

Rostov, les sourcils froncés, regarda les Français, salua sans envie et se tut.

Gilinsky, on le voyait, acceptait sans plaisir ce Russe dans son cercle ; il ne dit rien à Rostov. Boris semblait ne pas remarquer la gêne produite par ce nouveau venu, et avec le même calme